« C’est indécent, elle provoque les garçons ». Une jeune fille en classe de troisième s’est présentée au collège avec un débardeur qui montrait un peu ses épaules. La direction de l’établissement a ouvert une procédure disciplinaire contre l’élève. Sa mère a poussé un coup de gueule sur RMC et a publié la photo de sa fille en débardeurpour que chacun puisse juger de la supposée « indécence » de la tenue.
Lola, 14 ans, scolarisée au collège public d’Heyrieux (Isère), fait l’objet d’une procédure disciplinaire depuis la semaine passée. Le motif ? Ses tenues jugées « inadaptées » par la direction de l’établissement.
À deux reprises, (le 12 et le 30 septembre), la direction a estimé que Lola ne devait pas porter de tenues laissant voir ses épaules. Ces tenues sont jugées innappropriées « à une situation de travail », d’après le règlement intérieur de l’établissement.
La semaine dernière, Lola se rend en cours, vêtue d’un pull à manches longues qui laisse voir ses épaules. Quelques heures après, sa mère, Marion, reçoit un appel du collège.
« On me dit, on a donné une veste à Lola parce qu’elle ne peut pas rester la matinée comme ça, c’est indécent, elle provoque les garçons », rapporte la mère.
Quelques jours auparavant, c’était son débardeur qui lui avait valu un avertissement. Le collège a donc engagé une procédure disciplinaire à l’encontre de Lola.
« On stigmatise les filles »
« Elle va en payer les frais sur son dossier scolaire. Donc on veut que ça soit marqué ‘attention ça c’est une élève qui pose des problèmes’ ? Tout ça parce qu’elle vient en débardeur et qu’elle montre une épaule« , déplore sa mère, déterminée à ne pas se laisser faire : Lola continuera de s’habiller comme elle le veut. Marion estime que la décision du collège est un message dangereux adressé aux jeunes :
« On stigmatise les filles. On envoie un message en disant ‘vous les filles si vous êtes victimes de harcèlement ça sera de votre faute, regardez la façon dont vous êtes habillées’. C’est ahurissant », précise-t-elle.
Le rectorat, de son côté, assure qu’il ne souhaite pas stigmatiser la collégienne. Une réunion de médiation est prévue demain avec les parents de la jeune fille.
Le commentaire de Bellica :
Le problème dans cette affaire n’est pas qu’un établissement sanctionne une élève pour sa tenue, mais que ce genre de sanctions ne visent que des filles. Les affaires de ce type sont fréquentes concernant les filles et n’arrivent pratiquement jamais aux garçons portant des débardeurs. Un établissement scolaire est légitime à exiger que les élèves ne portent ni shorts, ni débardeurs, ni tongs, ni joggings hors des heures de sport, pour éviter une ambiance de travail trop relâchée. Mais dans ce cas, filles et garçons doivent être traités également. Le fait de se focaliser sur les tenues des filles, en allant même jusqu’à les accuser de « provoquer les garçons » est une pratique misogyne. Implicitement, le harcèlement contre les filles est légitimé, leur corps présenté comme un objet de tentation en soi. La charge de la culpabilité s’en trouve inversée : c’est à la femme de se cacher et non à l’homme de maîtriser ses pulsions, insinue-t-on.
Le positif de cette histoire est que désormais, cela choque l’opinion publique au point de susciter une médiatisation. Les faits de ce genre étaient bien plus courants par le passé et la différence de traitement entre filles et garçons choquait moins. On parle de ces affaires précisément parce qu’elles sont de plus en plus rares.