La Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) a validé jeudi la condamnation d’une femme par la justice autrichienne pour « dénigrement de doctrine religieuse » lors d’un séminaire sur l’islam. Le tort de cette Autrichienne ? Avoir qualifié de « pédophile » le mariage du prophète Mahomet avec une enfant de 6 ans, Aïcha, et la consommation sexuelle de ce mariage à 9 ans.
En 2011, l’Autriche a condamné une responsable du Parti Libéral Autrichien (FPÖ) à 480 euros d’amende pour avoir déclaré en 2009, lors de deux séminaires intitulés « Connaissance élémentaire de l’islam » : «Comment appelons-nous cela, si ce n’est de la pédophilie?». Dans ce séminaire, la militante évoquait le mariage et les relations sexuelles du prophète de l’islam avec une fillette et voulait alerter sur la pratique du mariage des mineurs dans l’islam. Après avoir épuisé tous les recours en Autriche, la condamnée a fait appel à la CEDH en 2012, invoquant l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme portant sur la liberté d’expression.
La CEDH estime qu’une telle critique de Mahomet « dépasse les limites acceptables d’un débat objectif » et « pourrait menacer la paix religieuse ». Dans l’arrêt qu’elle a rendu, la Cour a déclaré que les membres d’« un groupe religieux doivent tolérer la contestation de leurs croyances religieuses et même la diffusion par autrui de doctrines hostiles à leur foi, tant que les propos en question n’incitent pas à la haine ou à l’intolérance religieuse ».
Problème : le fait que Mahomet ait épousé Aïcha alors qu’elle n’avait que 6 ans et consommé le mariage à ses 9 ans n’est en rien une vue de l’esprit de la conférencière. Ces faits sont relatés dans les deux principaux recueils de hadith qui font autorité en islam sunnite : le Sahih al-Bukhari et le Sahih Muslim.
Gregor Puppinck, docteur en droit et directeur du Centre européen pour le droit et la justice (ECLJ), s’inquiète de cette décision de la CEDH :
« Le seul véritable motif de cette décision est la peur des musulmans. La Cour le dit expressément : les autorités autrichiennes ont eu raison de condamner ces propos pour préserver la «paix religieuse» et la «tolérance mutuelle» dans la société autrichienne. Selon la Cour, les États auraient à présent, et c’est nouveau, «l’obligation d’assurer la coexistence pacifique de toutes les religions et de ceux n’appartenant à aucune religion, en garantissant la tolérance mutuelle.»
La Cour (…) juge l’intention même de la conférencière, et la condamne en estimant qu’elle n’a pas tant cherché à informer le public qu’à «dénigrer» Mahomet et à démontrer «qu’il n’est pas digne d’être vénéré», et par suite à inciter à la violence. Ainsi, dénigrer Mahomet n’est pas protégé par la liberté d’expression: il ne faudrait en parler qu’avec respect et des bonnes intentions!
La Cour a jugé ensuite – de façon incroyable – que ces propos n’étaient pas l’expression d’un fait mais d’un jugement de valeur personnel et hostile, car la conférencière n’aurait pas resitué les faits dans leur contexte historique, ni précisé que la première épouse de Mahomet était bien plus âgée que lui. Dès lors, elle aurait «généralisé» la pédophilie de Mahomet de façon malveillante. Pour la Cour, alors, la conférencière était de mauvaise foi, et c’est «légitimement» que les musulmans auraient pu se sentir «offensés» par ces propos et que les juridictions autrichiennes les ont condamnés.
Cette décision est grave à mes yeux. D’abord parce qu’elle se résigne à l’intolérance et même à la violence des musulmans face à la critique, et qu’elle renonce à défendre fermement la liberté d’expression sur l’islam. En fait, c’est la violence même des musulmans qui justifierait et exigerait que leurs croyances soient davantage protégées contre les critiques.
Plus profondément, cette décision est aussi très grave car elle fait primer les objectifs de «tolérance mutuelle» et de «coexistence pacifique» sur la liberté de pensée et d’expression en matière religieuse. Elle permet de museler la critique de l’islam au nom du vivre-ensemble. Cela va à rebours de la modernité occidentale qui exige au contraire de soumettre l’islam à la critique historique, sans peur de bousculer les croyances de ses adeptes et même de provoquer des tensions. »