Mila, lycéenne de 16 ans, se retrouve en danger de mort pour avoir critiqué la dimension haineuse des religions en général et de l’islam en particulier, en réponse à un harcèlement lesbophobe et misogyne qu’elle venait de subir de la part d’internautes musulmans sur instagram. Elle est visée depuis samedi 19 janvier par des appels au lynchage, menaces de mort et injures ultra-violentes, qui se comptent par dizaines de milliers sur Twitter, Instagram et Snapchat. Son adresse et toutes sortes d’informations personnelles ont massivement circulé. Elle a dû être descolarisée d’urgence pour la protéger d’élèves déterminés à la lyncher à mort pour la punir de son « blasphème« . Les menaces sont d’une violence inouïe, alors que la jeune fille s’était contentée de réagir à son harcèlement sexiste et homophobe en tenant des propos généraux sur les religions en tant qu’idéologies. Des messages du type « On va te retrouver et t’égorger sale chienne« , « va mourir sale pute lesbienne« , « sale française« , elle en reçoit par milliers depuis samedi. Nous avons pu nous entretenir avec Mila. Elle nous a fourni d’abondantes preuves à l’appui de son témoignage. Elle entend rétablir la vérité sur son histoire et espère trouver de l’aide face à une meute violente qui tente de détruire sa vie.
Un harcèlement lesbophobe et misogyne initié par un dragueur voulant se venger d’avoir été éconduit
Tout a commencé le samedi 19 janvier, lorsque Mila, sur son compte instagram consacré à sa passion pour le chant, fait un « live » pour discuter avec ses abonnés et répondre à leurs questions. Un des sujets abordés est celui des préférences amoureuses. « On parlait de tout un tas de chose, et on a parlé à un moment de nos styles de filles et de gars, et une de mes abonnés a dit que son style de mec, c’était pas vraiment les rebeus, et j’ai répondu que c’était pareil pour moi, pas mon style ». Lors du même live, un abonné se met à la draguer de plus en plus lourdement. Mila l’éconduit en restant polie, mais en se moquant gentiment. Le dragueur éconduit entre dans une rage folle, se met à la traiter de raciste et il rameute plusieurs amis à lui pour insulter Mila. Elle reçoit de plus en plus de messages la traitant de « salope« , « sale française », « française de merde« , « sale pute« , « sale gouine« , « chiennasse » et on la menace de mort en invoquant Allah : « La putain tes morts on va te retrouver tu vas mourir« , « inchallah tu meurs sale pute que tu es ».
La suite du live porte sur les religions. Mila déclare rejetter toutes les religions. Plusieurs individus, vraisemblement des amis du dragueur vexé, montent encore d’un cran et se mettent alors à l’accuser de blasphème, à lui proférer des injures homophobes, misogynes et anti-françaises, et à la menacer de mort : « Pétasse, d’où tu dis ça notre dieu Allah c’est le seul et l’unique, j’espère tu vas brûler en enfer », « sale keh » (« pute » en arabe), « va mourir en enfer grosse pute sale lesbienne« . Mila est ciblée comme lesbienne, en raison du drapeau arc-en-ciel sur son profil, de sa coupe de cheveux courte et des mentions qu’elle fait parfois lors de ses lives au sujet de sa préférence personnelle pour les femmes.
Le harcèlement s’amplifie façon boule de neige, les intimidations, menaces et injures sont violentes, dans le but de pousser la jeune fille identifiée comme lesbienne et blasphématrice à présenter ses excuses aux religieux offensés. Mila refuse d’obéir et poste une mise au point en story sur Instagram. « Je déteste la religion, le coran, il n’y a que de la haine là-dedans, c’est de la merde, c’est ce que j’en pense. On ne peut pas être raciste d’une religion. L’islam est une religion, j’ai dit ce que j’en pensais, vous n’allez pas me le faire regretter. Votre religion c’est de la merde. » Pour Mila, « le coran est rempli de haine et d’incitation à la violence« , tout simplement, et l’attitude des « défenseurs » de cette religion tend à le confirmer.
La dimension homophobe du harcèlement contre Mila est particulièrement forte. Outre les injures lesbophobes, elle a été abreuvée de reproches du genre « Tu attaques l’islam alors que nous on ne peut rien dire sur les gays« . Or, comme elle le répète, captures d’écran à l’appui : « Contrairement à eux, je n’ai insulté personne, ni menacé, ni appelé à la violence envers qui que ce soit. Ce que j’ai fait, c’est du blasphème, c’est une critique générale des religion, et rien d’autre. » Ce qui frappe en effet dans les nombreuses captures d’écran que Mila nous a fournies, c’est le calme de ses réponses par rapport à la haine débridée qui se déversait sur elle.
« On va te retrouver et t’égorger, sale chienne »
Alors qu’elles étaient une réponse à un violent harcèlement par des musulmans misogynes et homophobes, les paroles de Mila sur l’islam ont été capturées et diffusées sorties de leur contexte sur Twitter, Instagram et Snapchat, pour organiser une vaste campagne de haine contre elle. Résultat : des milliers d’appels au meurtre, appels au lynchage, menaces physiques, divulgation d’informations personnelles et de photos privées, injures misogynes, homophobes et anti-françaises. « Je recevais 200 messages de pure haine à la minute », se confie Mila.
Des internautes se concertent pour la lyncher dans son lycée : « Elle est dans mon lycée, c’est une seconde et lundi on va régler ça« , « T’es au lycée Vincy (sic) attends-toi au pire, ça va te niquer ta mère« .
Le flot d’injures et menaces, tant en public qu’en message privé, est impressionnant : « Wesh sale pute sur le coran tu fous la haine INSHALLAH tu meurs sale lesbienne (…) t’es qui pour insulter notre religion sale folle passe ton adresse j’vais t’égorger« , « On va te retrouver et t’égorger sale chienne« , « Je te vois t’es morte sale chienne« , « espèce de pute de LGBT« , « t’es morte on sait où t’habites« , « Sale trou du cul de lesbienne on va te niquer toi« , « Crari tu parles des arabes toi ptite babtou (blanche), wallah on va venir avec des pelo, t’inquiète pas on va t’attraper« .
Le victim blaming à son paroxysme
Partout sur les réseaux sociaux, Mila est accusée d’avoir « provoqué », d’être la coupable de son harcèlement, de « l’avoir bien cherché » : bref, c’est le festival du victim blaming.
Outre les appels explicites à la violence et la divulgation de ses informations personnelles, la campagne de harcèlement est amplifiée par la participation d’influenceurs sur les réseaux sociaux, qui offrent Mila en pâture à leur meute de followers, en la faisant passer pour la coupable, occultant totalement le harcèlement misogyne, homophobe et raciste auquel Mila réagissait lorsqu’elle a parlé des religions.
Ainsi, sur Twitter, l’humoriste Jérémie Dethelot, au compte certifié, a incité ses 160 000 followers à participer à la campagne de haine contre Mila en la désignant comme fautive : « la haine engendre la haine, donc n’en semez pas« , a-t-il écrit dans un tweet où il affiche Mila. Tout le monde comprendra : « elle l’a bien cherché« .
De nombreux internautes ont même reproché à Mila de n’avoir pas qualifié l’islam de « religion d’amour et de paix« . Non seulement la victime de harcèlement est culpabilisée, mais en plus, on lui reproche de ne pas chanter les louanges de la religion au nom de laquelle ses harceleurs la harcèlent.
Danger de mort et avenir brisé
Mila a porté plainte. Elle ne peut plus suivre de scolarité normale car partout, des élèves déterminés à en découdre avec la « blasphématrice » sont prêts à lui faire payer cher ses paroles critiques envers le coran : « Je peux plus mettre un pied dans mon lycée, explique-t-elle, et je ne peux même pas changer de lycée parce que c’est la France entière qui veut ma peau ». Mais c’est précisément parce qu’elle n’est plus en sécurité nulle part, et parce qu’on tente de lui voler son avenir, que Mila a choisi de nous livrer son témoignage et de nous envoyer les preuves de son harcèlement. « Mon plus grand rêve dans la vie, c’était d’être chanteuse, et ils ont brisé mon rêve. J’aurai une étiquette collée sur le front à jamais. C’est ça qui me fait souffrir le plus. » Mila nous fait écouter les morceaux qu’elle a enregistrés en studio, des chansons d’amour tendres et mélancoliques, chantés d’une voix chaude. Un style de chant à fleur de peau mais maîtrisé, toujours sur le fil. On comprend que sa passion pour le chant n’est pas une velléité d’adolescente, mais bien un besoin vital, le projet de sa vie.
Le silence ne saurait calmer les choses : « Les gens n’oublient pas, internet n’oublie pas. Si je me tais, je laisse les harceleurs me faire passer pour celle que je ne suis pas. Je ne peux pas juste me taire dans l’espoir que les choses se tassent, car en attendant, il y a des comptes fake sur moi, et les gens, vu qu’ils n’ont pas de nouvelles de moi, ils vont s’exciter encore plus, inventer toujours plus de choses« . Non seulement des extraits tronqués des déclarations de Mila sont diffusés pour la harceler, mais en plus, son identité est usurpée sur divers réseaux pour lui nuire : « des gens ont usurpé mon identité sur les réseaux sociaux pour dire des choses complètement folles, et même pour dire que je vais me suicider. Non, je ne suis pas près de me suicider pour des personnes comme ça« . Sa situation est d’autant plus folle que « les gens qui m’insultent se font passer pour des victimes alors que depuis le début, c’est eux qui m’ont harcelée et ont appelé à la violence physique, pendant que je prenais sur moi de n’insulter personne« .
Comment aider Mila ?
Pour aider Mila :
- Partagez son témoignage autour de vous, sur tous vos réseaux
- Soutenez-la publiquement en utilisant le hashtag #JeSuisMila
- Interpellez le plus de personnalités publiques possibles sur son histoire, afin qu’ils prennent des mesures pour la protéger
- Abonnez-vous à la page facebook de soutien à Mila : Je Suis Mila.