Des étudiantes de l’Université de Floride Centrale se sont mobilisées en ligne pour faire expulser leur camarade Kathy Zhu en l’accusant d’« intolérance » et d’« ignorance ». Elles reprochent à l’étudiante d’avoir posté sur Twitter trois photos d’un stand d’essayage de hijab dans le cadre du World Hijab Day (journée mondiale du hijab) et d’avoir répondu « Non, merci » à la proposition de porter un hijab. Un appel à l’expulsion de Kathy Zhu a été relayé par plusieurs milliers d’internautes. Mal leur en a pris. Kathy est une blogueuse influente qui compte bien ne pas se laisser intimider. Elle a reçu le soutien massif de son public et de plusieurs politiques, activistes, blogueurs et journalistes. Kathy a finalement obtenu gain de cause auprès de son université.
« Non, merci. »
Kathy Zhu étudie à l’UFC, l’une des plus grandes universités américaines. Jeudi 1er février, dans le cadre de la journée mondiale du hijab, un groupe d’étudiantes volontaires de la Muslim Student Association a animé un stand d’essayage de hijabs dans le campus dans le but « d’éduquer les membres de l’université sur la signification et l’importance du hijab ». Comme l’explique la MCA dans son communiqué, l’opération consistait à alpaguer des étudiantes sur le campus toute la journée sur le campus pour les inciter à « essayer de porter un hijab pour une journée« .
Dans son communiqué, la MSA tente de se montrer rassurante : le port du hijab dans le campus est « optionnel » et « personne n’a été forcé ». L’association se défend d’avoir « exercé des pressions » pour faire porter le hijab aux étudiantes et affirme avoir simplement voulu les « éduquer« . Les hijabs étaient distribués gratuitement : l’événement était sponsorisé par plusieurs « entreprises de modest fashion » (« mode modeste » est le nom euphémisant utilisé pour renvoyer aux enseignes proposant divers hijabs et niqabs).
Lorsque Kathy Zhu s’est vue proposer de porter le hijab, elle a sobrement répondu « Non, merci », puis a pris en photo le stand et a exprimé sur Twitter son désaccord avec l’événement d’éducation au voile islamique.
« Il y a un stand « Essaye un hijab » sur le campus de ma fac, a-t-elle écrit. Donc maintenant, vous êtes en train de nous dire que c’est juste un accessoire de mode et pas un symbole religieux ? Ou bien vous tentez d’habituer les femmes à être opprimées par l’islam ? »
https://twitter.com/PoliticalKathy/status/959106695812218880
Elle a également posté une série de photos montrant le stand et les écriteaux sur lesquels il était inscrit « Hijabs gratuits« , « Mon hijab me rend puissante« , ou encore « Mon hijab est un symbole de compréhension« .
https://twitter.com/PoliticalKathy/status/959114087421661191
L’une des militantes visibles sur la photo a alors vigoureusement réagi. Elle reproche à Kathy de s’être montrée « ignorante » et « pathétique ». « Je t’ai invitée à essayer un hijab et tu as dit « Non, merci » sans prendre le temps de nous poser de questions ni essayer de comprendre ce qu’est le hijab », s’est-elle scandalisée.
Elle appelle sa communauté à se mobiliser pour faire expulser Kathy de son université :
« TWITTER, FAIS CE QUE TU SAIS FAIRE. Faisons expulser cette fille. Envoyez un mail à st_condu[at]ucf.edu (BUREAU DES ETUDIANTS DE L’UCF) et envoyez-leur le tweet de Kathy, avec ses photos. L’ignorance ne saurait être tolérée sur mon campus ».
Retour de flammes
Les accusations et appels à la délation de l’étudiante pro-voile ont été relayés par des milliers de personnes et l’université reçoit « plusieurs courriels de plaintes ». Les auteures de la campane contre Kathy utilisent un argument classique des militants pro-voile américains, britanniques et français : elles accusent la jeune femme d’avoir publié une photo de femme voilée « sans son consentement ».
Kathy Zhu fait part à ses 39 000 abonnés de sa ferme intention de ne pas se laisser intimider. Elle publie un bref communiqué ainsi qu’une vidéo dans laquelle elle déclare que cette campagne d’intimidation, « c’est la définition du fascisme ». Quant aux accusations de non-respect du droit à l’image, elle les balaye d’un revers de la main puisque l’événement était une manifestation politique publique et qu’aucune des femmes photographiées n’a été personnellement ciblée.
https://twitter.com/PoliticalKathy/status/959245611903193089
Sur le hashtag #IStandWithKathyZhu, de nombreux internautes manifestent leur soutien à Kathy. Parmi eux, le secrétaire d’Etat assistant aux transports Oliver McGee, la militante féministe athéiste Yasmine Mohammed, la journaliste Laura Loomer et la militante anarchiste Cassandra Fairbanks.
Thank you @Imamofpeace for educating @UCF on Islamic teachings. @PoliticalKathy hang in there! https://t.co/jtIjCOrp6c
— Oliver McGee PhD MBA (@OliverMcGee) February 2, 2018
Well done, Kathy! ✊💕 You give me hope for the future of humanity!#NoHijabDay
— Yasmine Mohammed 🦋 ياسمين محمد (@YasMohammedxx) February 2, 2018
https://twitter.com/CassandraRules/status/959242358029209600
L’Université a finalement tranché en faveur de Kathy, estimant que ses publications « ne contreviennent pas aux règles de conduite » de l’UCF.
For resources relating to this statement, please click here: https://t.co/aRu4VvHhnt pic.twitter.com/Ff5gdK0CyX
— UCF (@UCF) February 2, 2018
L’étudiante qui a lancé les accusations contre Kathy ainsi que les étudiantes qui ont participé à la campagne agressive se voient désormais accusées de harcèlement en ligne et donc de violation des règles de conduites de l’université.
https://twitter.com/McCMatt/status/959487866924658688
We demand @UCF take action against the student who targeted Kathy.
They have CLEARLY violated your code of conduct.
— Mike Coudrey (@MichaelCoudrey) February 2, 2018
https://twitter.com/LauraLoomer/status/959519263168999425
Ce genre de campagne de harcèlement contre les femmes anti-hijab est de plus en plus courant. En août dernier, en France, une coach sportive a subi une campagne de harcèlement particulièrement violente, riche en insultes et menaces, pour avoir critiqué le voile sur sa page Facebook. De nombreux internautes pro-voile s’étaient mobilisés pour pousser son employeur à la licencier. Tout comme Cathy, Julia Zborobska ne s’était pas laissée intimider et a assumé ses propos. Elle a porté l’affaire devant la justice, a obtenu le classement de l’affaire et a pu reprendre normalement le travail.