Chaque année, des dizaines de milliers de femmes sont agressées à Paris dans la rue, les transports ou dans leurs immeubles. Si la situation est banale, rares sont les documents audio ou vidéo qui en attestent directement. Roxane, Parisienne de 29 ans, a eu la présence d’esprit d’enregistrer sa conversation avec l’homme qui l’a suivie et harcelée ce mardi 13 décembre.
Roxane a confié son enregistrement et son témoignage à Konbini.
“Mardi soir, le 13 décembre, lorsque je rentrais chez moi aux alentours de 21 heures, un homme a tenté de m’agresser.
Une belle journée se termine, il fait frais, il fait nuit, la pleine lune éclaire le ciel, je l’admire quelques instants, je me sens bien, rien d’inhabituel. Prudente, comme toujours, j’attends que la porte automatique et blindée de mon petit immeuble commence à se refermer derrière moi.
Pourtant, alors que je monte les premières marches, je sens une présence dans mon dos. Je me retourne, je vois cet homme, son sourire malsain. Les secondes se font plus longues, mon intuition m’alerte, mais je ne m’arrête pas, j’espère encore qu’il ne s’agit que d’un voisin.
Les étages défilent, il ne rentre nulle part, je dois me rendre à l’évidence. Il me dit que je suis belle, il se rapproche de moi. Une petite voix débarque dans ma tête : ‘Roxane, tu vas te faire agresser, Roxane, tu ne seras pas sa victime, il en est hors de question.’
Je me retourne. Le regard qu’il pose sur moi est répugnant, il me sourit, comme pour m’amadouer. Ses deux mains dans les poches, il est peut-être armé, ou pas. Coincée dans la minuscule cage d’escalier, je me vois potentiellement mourir, finir dans de tristes statistiques.
Mon instinct me dit que je n’ai plus le temps de téléphoner, j’appuie sur le bouton enregistreur de WhatsApp. »
Roxane parvient à enregistrer la scène, et surtout à se débarrasser de l’homme au terme d’une négociation ferme qui dure environ cinq minutes.
Harcèlement : pourquoi les femmes se taisent
Pour Roxane, « le harcèlement des femmes est une réalité, un fléau à combattre », et la tenue vestimentaire ne change rien à l’affaire : « j’étais en jean, baskets, doudoune, bonnet ».
Tant de femmes sont harcelées et suivies chaque jour à Paris, qu’il est difficile de porter plainte en l’absence de violences physiques : « L’équipe de police venue sur place le soir même a été professionnelle et bienveillante. Le lendemain pourtant au commissariat, l’agent d’accueil n’a pas trouvé utile de me laisser entrer pour porter plainte. ‘Vous savez Mademoiselle, à Paris, des gens se suivent tous les jours’. Allez savoir pourquoi les femmes se taisent.‘”
En 2015, une enquête révélait que 76% des Françaises déclaraient avoir déjà été suivies de manière inquiétante par un inconnu dans la rue ».